Une entrevue signée Pierre-Alain Belpaire, publiée le 10 février 2021 dans HRIMag.
« J’espère que ma deuxième année à la tête de l’Association sera plus paisible que la première. Remarquez, ce ne devrait pas être trop difficile… » Au bout du fil, et malgré la situation, Gilber Paquette garde son calme et son sourire. Deux qualités dont il a grandement eu besoin depuis qu’il a repris les rênes de l’Association des professionnels des congrès du Québec, rebaptisée Tourisme d’Affaires Québec dans les dernières semaines de 2020. « Je suis entré en fonction le 10 février 2020, à un moment où l’on parlait très peu du virus », se remémore-t-il. Le marché que cet homme issu du monde des hebdomadaires rejoint se porte alors très bien : au cours des derniers exercices, il enregistrait une croissance annuelle de près de 5 % et profitait notamment d’une hausse du nombre d’évènements et de l’intérêt grandissant du milieu hôtelier.
Dès la semaine de relâche, Gilber Paquette s’inquiète toutefois des effets que pourrait avoir ce mystérieux virus sur le tourisme d’affaires québécois. « J’ai compris que si ça devait frapper lourdement la province, on serait sans doute l’une des industries les plus touchées. On entrevoyait le danger, mais on ne voulait pas y croire. Pas encore. » Pourtant, la multiplication des cas et les annonces gouvernementales de la mi-mars confirment ses craintes. « Du 13 mars jusqu’à la fin du mois de juin et l’adoption du plan de sécurité sanitaire, on a été complètement paralysés. Zéro évènement. Le calme plat. » Résultat : durant la première vague seulement, le secteur enregistrait des pertes de 202 millions de dollars. « Une catastrophe ! »
Malgré une inspirante et intéressante reprise estivale, le directeur général ne s’en cache pas : la pente à remonter sera abrupte, et le chemin bien long avant de retrouver une pleine normalité. Surtout, au-delà de ces chiffres alarmants et de leurs lourdes conséquences économiques et humaines, le responsable regrette le manque de considération témoigné envers son secteur par les décideurs politiques. « Le gouvernement n’a jamais évoqué le tourisme d’affaires dans ses points de presse. Et on ne se reconnaissait pas dans les mesures qu’il annonçait. » La situation est d’autant plus étonnante que cette industrie générait, en 2018, plus de 600 millions de dollars en dépenses directes et que quelque 27 000 Québécois travaillaient, avant la pandémie, à l’organisation de plus de 2000 évènements annuels. « Et malgré cela, ils nous ont oubliés… »
REPARTIR DE ZÉRO
Réaliste, Gilber Paquette n’en reste pas moins un véritable optimiste. Et si, au cours des derniers mois, le virtuel s’est encore un peu plus invité dans nos vies, le dirigeant en est persuadé : employeurs, employés, clients, collaborateurs et partenaires ressentiront très vite le besoin de se réunir à nouveau et de se côtoyer autrement que par écrans interposés. Et ce même si les mesures sanitaires (distanciation physique, limitation du nombre de participants, etc.) devaient être prolongées durant encore plusieurs mois. « Je ne crois pas que , dans notre industrie, la formule virtuelle restera populaire. L’aspect social d’un congrès, le réseautage, les discussions durant les repas ou le cocktail, tout ce côté festif, le virtuel ne peut pas pour l’heure le remplacer. »
Pour aider au mieux les professionnels du tourisme d’affaires, Gilber Paquette entend poursuivre au cours des prochains mois la mue de son association. Après un symbolique changement d’identité (« Avec ce nouveau nom, on rassemble désormais l’ensemble de l’écosystème sous un même toit »), il entend également optimiser le fonctionnement de l’OBNL, repenser la structure, les mécanismes d’embauche, le modèle de gestion, etc. « Le marché a beaucoup évolué. Nous, on a opéré un premier virage, mais c’est loin d’être suffisant. Pour que l’organisation puisse continuer à vivre, il faut réfléchir comme s’il s’agissait d’une start-up et repartir de zéro… pendant l’année du 40e anniversaire. »
Fort de près de 150 membres (principalement des hôtels et des centres de congrès, mais aussi des destinations touristiques, des municipalités, etc.), Tourisme d’Affaires Québec a profité de la pandémie pour mieux communiquer avec ceux-ci, souligne le directeur général. « On les a écoutés : ils veulent qu’on génère des occasions d’affaires, mais ils attendent aussi de nous qu’on ait un poids politique plus important, qu’on se rapproche des milieux économiques. Bref, ils veulent qu’on se fasse entendre. Eh bien, on est prêts à donner de la voix ! »